Opérations internationales : focus sur les principales différences contractuelles entre le système de la common law et le système civiliste

Choisir la loi applicable lors d’une opération internationale constitue une tâche ardue. Généralement, la partie qui rédige sera tentée de choisir le droit du pays d’établissement de la société ou – s’agissant d’un juriste d’entreprise ou d’un avocat – le droit dans lequel il/elle a effectué ses études ou a été admis comme avocat. Dans tous les cas, une clause contractuelle définissant le droit applicable au contrat, sera toujours fortement recommandée, ne serait-ce que pour éviter l’incertitude associée au régime applicable aux obligations des parties.

Même si la plupart des juridictions à travers le monde sont des juridictions civilistes, la plupart des contrats privés internationaux entre sociétés sont gouvernés par le droit de la common law, en notamment, en Europe, le droit anglais ou le droit de l’État de NY s’agissant des contrats au champ d’application transatlantique. Or, lorsque le choix de la législation applicable au contrat se porte sur le droit américain ou anglais, il faut savoir d’une part que le système juridique applicable, celui de la common law, est très éloigné du système de droit romain dont est issu le droit français, et que d’autre part les techniques rédactionnelles des régimes anglo-saxons sont très différentes de celles des régimes civilistes.

Pourtant, s’il est une règle commune à l’ensemble de ces régimes c’est que le contrat fait loi entre les parties, bien qu’en droit français cette pratique soit en pratique plus nuancée et limitée par les dispositions d’ordre public. Le droit anglo-saxon étant très peu codifié et très dépendant de la jurisprudence, laquelle est volumineuse et, s’agissant des États-Unis, varie parfois de façon substantielle d’un État à l’autre, il est indispensable lors d’opérations internationales d’être accompagné par un avocat possédant, sinon une double formation en droit anglo-saxon et en droit civil, à tout du moins une expérience confirmée des différences dans la rédaction des contrats commerciaux entre les deux régimes, lui permettant de maîtriser les techniques rédactionnelles et les concepts de chacun de ces systèmes juridiques.

En effet, tout contrat incomplet ou imprécis constitue autant de risque de litiges, et donc de coûts pour la société, car toute incertitude ou imprécision rédactionnelle sera, en cas de litige, interprétée au détriment de la partie qui cherche à se prévaloir des protections contractuelles.

Ce qu’il faut savoir lors de la négociation

Il existe, au stade de la négociation d’un contrat, une différence fondamentale entre le régime juridique civiliste et celui des systèmes de la Common Law.

Là où en France la bonne foi est obligatoire dès les négociations (article 1104 du Code civil), aux USA ce principe est rejeté pour faire primer à la place, la liberté de négociation, puisque chaque partie ayant des intérêts divergents, chacune demeure libre de négocier des clauses plus avantageuses, sauf à ce qu’elles s’engagent par écrit et pré contractuellement, à respecter un devoir de loyauté.

En pratique, cette différence est de taille puisque dans les conventions soumises au droit de la common law, il sera compliqué d’obtenir une indemnité au stade précontractuel, en cas de faute pour défaut de loyauté.

Ce qu’il faut savoir lors de la rédaction

Sous le régime de la common law, le contrat est soumis à la technique d’interprétation des juges, réalisée par une analyse littérale de chaque terme utilisé, de sorte que la pratique en matière de rédaction est de détailler le plus possible les éléments contractuels, notamment par le jeu de définitions, afin d’éviter toute difficulté d’interprétation. Ainsi les contrats anglais ou américains sont généralement très longs comparés aux contrats français.
Les contrats soumis à la common law peuvent à la fois contenir des termes exprès, inhérents au contrat, mais également contenus dans des documents autres auxquels la convention fait référence, en plus de termes implicites, c’est-à-dire appliqués implicitement du fait d’une loi, que les parties aient eu ou non l’intention de s’en prévaloir.

À la différence, le droit civiliste étant très codifié, il n’est pas nécessaire de sur-détailler les clauses du contrat, puisque toute lacune, imprécision ou ambiguïté sera corrigée par application de la loi correspondante.

Dans les contrats soumis au droit américain en particulier, du fait de l’incertitude liée à une interprétation par un tribunal, les parties voudront minimiser les risques d’aléas rédactionnels au maximum en détaillant autant que possible les obligations respectives des parties. Dans les contrats entre professionnels et consommateurs ou dans les contrats d’adhésion, notamment, on fera usage de majuscules et de caractères gras s’agissant des garanties, exclusions et limitations de responsabilité afin de pouvoir, en cas de contestation, démontrer avoir porté les clauses en question clairement et de façon bien lisible à l’attention de l’autre partie.

Ce qu’il faut savoir lors d’un litige

Lorsqu’un litige naît de l’application d’un contrat, la question de la responsabilité et intrinsèquement de la réparation du préjudice se pose.

Le droit civiliste comme celui de la common law admettent des clauses limitatives de responsabilité, voire exonératoires de responsabilité, à la différence que les régimes de la common law imposent une condition liée au caractère raisonnable de la limitation ou de l’exclusion.

Concernant les dommages et intérêts, en France par exemple, ces derniers ont vocation à réparer le préjudice subi et uniquement celui-ci. Il s’agit du principe de la réparation intégrale permettant la stricte équivalence entre le montant des dommages et intérêts et la réparation du préjudice.

À l’inverse, certains pays de la common law, et notamment les États-Unis, admettent une réparation qui va souvent bien au-delà du préjudice subi, notamment par le biais de dommages et intérêts dits punitifs.

Qu’il s’agisse de l’implantation d’une filiale dans un pays soumis au droit de la common law, ou simplement de la conclusion d’accords commerciaux gouvernés par une loi d’un pays anglo-saxon, on ne saurait insister sur la nécessité pour les sociétés non familières avec les principes du droit anglo-américain d’être accompagnées par un avocat spécialisé, disposant d’une double formation en droit civiliste et de la common law.

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